mar 05/04/2022 - 12:02

Huit ans. C'est la durée de la crise au Yémen, une guerre civile ayant contraint plus de 4 millions de personnes à se déplacer au sein du pays. Une crise dévastatrice, qui a détruit les services de santé et les réserves alimentaires sur place. Une situation qui ne cesse de se détériorer, faisant du Yémen la plus grande crise humanitaire au monde à ce jour avec 66% de la population du pays dépendante de l’aide humanitaire. 

Un conflit aux effets collatéraux multiples  

Dans un pays parmi les plus pauvres du Moyen-Orient, la guerre civile démarrée en 2014 n'a fait qu'aggraver une situation généralisée de très grande pauvreté et précarité. La population civile est la plus impactée par cette crise, avec deux yéménites sur trois dépendants de l'aide humanitaire, 20 millions de personnes.  

Ce conflit armé a entrainé dans son sillage de multiples crises qui affectent tous les aspects de la vie des populations : absence quasi totale d'accès aux soins avec la destruction des services de santé, manque criant de nourriture, nombre important de logements détruits. Démunis, sans toit, ni nourriture, plus de 4 millions de personnes ont été contraintes de fuir leurs foyers et vivent dans des conditions désespérées. Ne pouvant plus répondre à leurs besoins essentiels, elles sont extrêmement exposées et ont besoin d'une aide d'urgence.  

Face à un conflit qui ne montre aucun signe d'issue, des solutions durables doivent être trouvées. Mais pour cela, continuer à parler de ces crises dont on parle moins est indispensable, comme l’expliquait déjà en 2018 Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. 

Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés :  

Il existe un lien direct entre l'attention médiatique et les fonds alloués à l'aide humanitaire. Les dirigeants politiques doivent intensifier les efforts et assumer la responsabilité de lutter contre les crises oubliées d’aujourd’hui.
Le gouvernorat de Marib accueille un quart des quatre millions de personnes déplacées à l’intérieur du Yémen.
Le gouvernorat de Marib accueille un quart des quatre millions de personnes déplacées à l’intérieur du Yémen.
Des déplacés internes de plus en plus nombreux vivant dans des conditions effroyables 

En 2021, les bombardements, les combats et les frappes aériennes intenses ont contraint plus de 20'000 personnes à se déplacer dans le gouvernorat de Marib. Une région qui accueille déjà un quart des quatre millions de personnes déplacées à l’intérieur du Yémen, dans des conditions effroyables et inhumaines.  

Les abris, n'offrant dans la très grande majorité ni eau potable, ni latrines, ni électricité sont saturés, accueillant au total près de 190'000 personnes, dont 80% de femmes et d'enfants.  

En raison de la situation extrêmement dangereuse sur place et un acheminement de l'aide vitale très compliqué, les partenaires humanitaires ne peuvent fournir des ressources que très limitées. De nombreuses familles ont donc été obligées de construire des abris de fortune. Des abris abimés ou détruits plusieurs fois par année par des inondations accentuant encore davantage l'immense précarité de ces populations déplacées.  

Malgré les difficultés rencontrées dans ce contexte, le HCR fourni un matériel d'aide qui est acheminé et distribué aux personnes dans le besoin à travers l’ensemble des 20 gouvernorats affectés par le conflit. L'Organisation apporte un appui aux structures de santé qui assurent des soins aux réfugiés, aux demandeurs d’asile et aux Yéménites affectés par la violence. Enfin, le HCR travaille avec Society for Humanitarian Solidarity (SHS) afin d'apporter des articles ménagers de première nécessité, une aide juridique et un soutien psychosocial dans sept installations de déplacés, situées dans le district de Sirwah à Marib et qui accueillent environ 20 000 personnes. De l'argent est également donné sous forme d'allocations d’aide à plus de 2800 familles pour le paiement des loyers, dans le cadre d’un plan visant à aider quelque 6000 familles menacées d’expulsion. 

La menace d'une famine à grande échelle 

Le risque d’une famine à grande échelle dans le pays n’a jamais été aussi aigu.  

Des dizaines de milliers de personnes souffrent de la faim, et 5 millions d’autres sombrent dans la famine.  

Dans ce contexte, les familles déplacées sont quatre fois plus exposées au risque de famine que le reste de la population yéménite. Parmi elles, plus de 3 millions de femmes enceintes ou allaitantes et d'enfants de moins de 5 ans atteint-e-s de malnutrition aiguë. Ce taux de malnutrition infantile est le plus élevé au monde.  

Aujourd'hui, le Programme Alimentaire Mondial estime à 20,7 millions le nombre de personnes qui souffriront d'insécurité alimentaire au Yémen en décembre 2022.  

Les solutions mises en place (soutient aux populations via une aide alimentaire d'urgence) doivent être élargies et pérennisées très rapidement pour que chaque yéménite puisse se nourrir.   

Continuer à apporter de l'aide et de mettre en lumière cette crise  

En 2021, le prix Nansen* décerné par le HCR a été attribué à l’ONG Jeel Albena, en reconnaissance de tout le dévouement, la bravoure et les actions concrètes de l'association pour venir en aide aux Yéménites déplacés par le conflit. Depuis le début du conflit, l'ONG est présente sur place, fournissant abris d'urgence, services vitaux et espoir à des milliers de personnes déplacées à l'intérieur du pays. À ce jour, Jeel Albena a aidé plus de 18'000 yéménites.

Nous sommes restés au Yémen durant toutes les situations d’urgence et avons aidé les gens à traverser des combats intenses, des inondations, le choléra et maintenant une épidémie de COVID-19

a déclaré Ameen Jubran, chef et cofondateur de Jeel Albena lors de la remise du prix.  

Ameen Jubran, chef et cofondateur de Jeel Albena, dans l'un des camps de réfugiés du pays.
Ameen Jubran, chef et cofondateur de Jeel Albena, dans l'un des camps de réfugiés du pays.

Rendre visible ce travail exceptionnel engagé par les ONG et autres acteurs de terrain c'est permettre à la solidarité de continuer à soutenir les populations déplacées et contraintes de fuir du Yemen. 

Mettre fin au conflit est le seul moyen de faire cesser les déplacements forcés et les souffrances du peuple yéménite. Le HCR réitère son appel à toutes les parties au conflit pour qu’elles prennent les mesures nécessaires afin de protéger les civils et les infrastructures publiques de l’impact du conflit, et de fournir un passage sûr aux civils qui fuient les zones de conflit. 

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* La distinction Nansen pour les réfugiés a été créée en 1954 en l’honneur de Fridtjof Nansen, explorateur polaire et scientifique norvégien, également premier Haut Commissaire aux réfugiés de la Société des Nations. Le prix Nansen pour les réfugiés est remis à Genève, où se situe le siège de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés.